Le 16 janvier 1917, Arthur Zimmermann, ministre des Affaires étrangères de l’Empire allemand, transmet un télégramme secret codé à l’ambassadeur allemand au Mexique.
Le télégramme Zimmermann est un message diplomatique confidentiel qui contient une proposition d’alliance entre l’Allemagne et le Mexique contre les États-Unis. Dans ce télégramme, l’Allemagne propose au Mexique d’attaquer les États-Unis si ces derniers entrent en guerre aux côtés des Alliés. En échange, l’Allemagne promet un soutien financier et l’aide nécessaire pour que le Mexique reconquière les territoires perdus lors de la guerre américano-mexicaine de 1848, à savoir le Texas, le Nouveau-Mexique et l’Arizona.
L’interception de ce télégramme met initialement les services de renseignement britanniques dans l’embarras pour deux raisons principales. Premièrement, ils ont obtenu le télégramme en espionnant le réseau de communication américain, révélant ainsi qu’ils surveillaient leurs alliés potentiels. Deuxièmement, le télégramme a été chiffré avec un code diplomatique récent que les Britanniques ont partiellement déchiffré. Ils ne veulent pas que les Allemands apprennent qu’ils sont capables de décrypter ce code, car cela compromettrait leur avantage en matière de renseignement.
Pour s’en sortir sans fâcher les Américains, les Britanniques utilisent une stratégie ingénieuse. Ils prétendent avoir obtenu une copie du télégramme au Mexique, où il a été retransmis. Ils font également en sorte que les Américains puissent obtenir leur propre copie du message à partir de leurs archives télégraphiques. Cette approche permet aux Britanniques de partager l’information cruciale sans révéler leurs méthodes d’espionnage et de décryptage.
Les conséquences de cette affaire sont considérables. La publication du télégramme dans la presse américaine le 1er mars 1917 provoque un scandale et un retournement de l’opinion publique, jusqu’alors hostile à l’entrée en guerre. Cet événement joue un rôle crucial dans la décision des États-Unis de déclarer la guerre à l’Allemagne le 6 avril 1917, marquant ainsi leur entrée dans la Première Guerre mondiale. L’implication américaine modifie considérablement l’équilibre des forces en présence, avec l’envoi de plus de quatre millions de soldats au combat. Cette affaire renforce également la coopération entre les services de renseignement britanniques et américains, posant les bases d’une alliance durable entre les deux pays.
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Le rôle de la Room 40
La Room 40, créée en octobre 1914 au sein de l’Amirauté britannique, constitue le service de cryptanalyse chargé d’intercepter et de décrypter les communications codées de l’Empire allemand pendant la Première Guerre mondiale. Son nom provient simplement de la salle numéro 40 de l’Old Admiralty Building à Londres, où elle s’installe à l’origine. Composée de civils et de militaires aux compétences variées, la Room 40 s’appuie sur des documents cruciaux, notamment le livre de codes navals allemands récupéré sur l’épave du croiseur SMS Magdeburg par les Russes, puis transmis aux Britanniques. Cette acquisition permet aux spécialistes britanniques de percer les secrets des transmissions ennemies et de suivre les mouvements de la flotte allemande, ce qui s’avère décisif lors de batailles comme celle du Dogger Bank ou du Jutland.
L’un des plus grands succès de la Room 40 reste ce décryptage du télégramme Zimmermann en 1917. Au total, la Room 40 parvient à décrypter environ 15 000 messages allemands durant le conflit, jouant un rôle essentiel dans la supériorité du renseignement allié. Malgré les changements de codes opérés par l’Allemagne, le retard dans leur mise en œuvre permet à la Room 40 de conserver un avantage stratégique durable. Après la guerre, ce service fusionne avec son équivalent de l’armée de terre pour devenir le Government Code and Cypher School, ancêtre du célèbre GCHQ britannique.