UNE BATAILLE QUI FIT COULER BEAUCOUP D’ENCRE 📆 25 février 1830

Le 25 février 1830 marque le début de la célèbre bataille d’Hernani, un affrontement culturel et artistique qui secoue le monde littéraire parisien et dont les échos résonnent encore aujourd’hui.

La bataille d’Hernani est un conflit symbolique qui éclate lors de la première représentation de la pièce « Hernani » de Victor Hugo à la Comédie-Française. Cette œuvre romantique provoque un scandale en bravant les conventions du théâtre classique, déclenchant des débats passionnés et des affrontements entre partisans et opposants du romantisme. Les « Jeunes-France », partisans du romantisme, s’opposent vivement aux défenseurs du classicisme, créant une atmosphère électrique dans la salle de théâtre.

🤔 Mais quelle est l’histoire d’Hernani au juste ?

La pièce se déroule en Espagne en 1519. L’intrigue met en scène un triangle amoureux : Hernani, un jeune bandit noble, aime Doña Sol, promise à son oncle Don Ruy Gomez. Le roi Don Carlos convoite également Doña Sol. Après de nombreux rebondissements, Hernani et Doña Sol peuvent enfin s’unir. Cependant, lié par un serment d’honneur envers Don Ruy Gomez, Hernani doit se suicider. Doña Sol choisit de mourir avec lui.

Les classicistes défendent un théâtre respectant des règles strictes héritées de l’Antiquité et codifiées au XVIIe siècle. Ils prônent le respect des trois unités (lieu, temps, action), la vraisemblance des situations, la bienséance dans les comportements des personnages, et un but moral et didactique de l’art. Ils valorisent la raison, la mesure et l’équilibre dans l’expression artistique.

Les romantiques, en revanche, revendiquent une liberté artistique totale. Ils rejettent les règles classiques qu’ils jugent artificielles et contraignantes. Ils mettent en avant l’expression des sentiments, l’individualité de l’artiste, et l’importance de l’imagination. Les romantiques explorent de nouveaux thèmes comme la mélancolie, le fantastique, l’exotisme, et la nature sauvage. Ils valorisent également le mélange des genres (tragique et comique) et s’intéressent à l’histoire nationale, notamment le Moyen Âge.

Le romantisme français naît au début du XIXe siècle, influencé par les mouvements allemands (Sturm und Drang) et anglais (romans gothiques). Il trouve ses racines dans le préromantisme de Jean-Jacques Rousseau, qui valorise déjà la sensibilité et la nature. La Révolution française joue un rôle crucial en bouleversant les cadres sociaux et culturels, créant un terrain propice à l’émergence de nouvelles formes d’expression.

Des précurseurs comme Chateaubriand avec « René » (1802) et Madame de Staël avec « De l’Allemagne » (1810) introduisent des thèmes romantiques en France. Ils mettent en avant la mélancolie, l’individualité, et l’importance des sentiments. Le mouvement s’affirme véritablement avec la publication des « Méditations poétiques » de Lamartine en 1820, qui connaît un succès retentissant.

Victor Hugo, initialement classique, se convertit au romantisme et devient rapidement la figure de proue du mouvement. Son recueil « Les Orientales » (1829) et sa préface de « Cromwell » (1827), véritable manifeste du romantisme, préparent le terrain pour la bataille d’Hernani.

La remise en cause du classicisme par le romantisme s’inscrit dans un mouvement plus large de contestation de l’ordre établi. En rejetant les règles classiques, les romantiques remettent en question non seulement des conventions artistiques, mais aussi l’autorité et la tradition en général. Cette attitude contestataire fait écho aux aspirations politiques libérales de l’époque.

La bataille d’Hernani, en février 1830, préfigure en quelque sorte la révolution des Trois Glorieuses de juillet 1830. Les deux événements partagent un esprit de révolte contre les institutions en place : l’un dans le domaine artistique, l’autre dans le domaine politique. La jeunesse romantique qui défend Hugo au théâtre est animée du même désir de changement que celle qui descend dans les rues pour renverser Charles X.

Ainsi, la remise en cause du classicisme participe à un climat général de contestation qui culmine avec la révolution de Juillet. Les Trois Glorieuses, comme la bataille d’Hernani, marquent une rupture avec l’Ancien Régime et ouvrent la voie à de nouvelles formes d’expression et de gouvernement. La monarchie de Juillet qui en résulte, plus libérale, offre un cadre propice à l’épanouissement du romantisme dans les années qui suivent.


Illustration: La Première d’Hernani, 1830, huile sur toile d’Albert Besnard, maison de Victor Hugo, 1903. – Wikipédia

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