FRANCE GALL, UNE POUPÉE DE CIRE ET DE SON 📆 20 mars 1965

Le 20 mars 1965, France Gall interprète « Poupée de cire, poupée de son » lors du Concours Eurovision de la chanson à Naples, en Italie. Représentant le Luxembourg et non la France, la jeune chanteuse de 17 ans chante cette chanson écrite et composée par Serge Gainsbourg devant près de 200 millions de téléspectateurs.

En 1965, France Gall est une jeune artiste yéyé qui commence à se faire un nom dans le paysage musical français. Sa carrière est prometteuse, apparaissant à l’automne 1964 sur la couverture du magazine « Mademoiselle Âge tendre », ce qui attire l’attention de Serge Gainsbourg. Quant à ce dernier, il est alors un parfait inconnu pour l’immense majorité des Français, ses premiers albums étant des échecs commerciaux. Il cherche à se réinventer après une tournée désastreuse en février 1965 où il est très mal accepté par le public. En écrivant pour France Gall, « Gainsbourg trempe sa plume dans du lait et s’éloigne des vapeurs de whisky ».

Lors des répétitions à Naples, Serge Gainsbourg réagit avec colère face à l’attitude de l’orchestre italien. Les musiciens de la RAI huent France Gall et comparent la partition de Gainsbourg au « bruit d’une cavalcade ». Ils sont mécontents de devoir jouer un morceau aussi rapide, ce qui était inhabituel pour l’Eurovision à cette époque. Furieux, Gainsbourg insulte l’orchestre, claque la porte des répétitions et menace de retirer sa chanson du concours. Il va même jusqu’à menacer de quitter Naples entièrement et de retourner à Paris, laissant France Gall seule avec un orchestre en colère pour terminer la répétition. Il revient toutefois le jour de la finale.

« Poupée de cire, poupée de son » est une chanson riche en métaphores. Le titre utilise la double image de la poupée pour évoquer l’artificialité et la manipulation. La « poupée de cire » fait référence aux anciennes poupées du XVIIIe siècle avec leur tête en cire, mais aussi à la cire des disques vinyles sur lesquels sont gravées les chansons. La « poupée de son » évoque à la fois le son musical produit par la chanteuse et les poupées traditionnelles rembourrées de son (résidu de broyage des céréales). Cette métaphore dépeint France Gall comme une jeune artiste manipulée comme une poupée par l’industrie musicale, chantant des paroles qui ne reflètent pas sa propre vie. La chanson exprime également un désir d’émancipation à travers des paroles comme « Je ne suis qu’une poupée de cire, mais un jour je vivrai mes chansons ».

France Gall remporte le Grand Prix de l’Eurovision avec 32 points, devançant le Royaume-Uni qui termine deuxième. La France, représentée par Guy Mardel avec la chanson « N’avoue jamais », se classe troisième de cette dixième édition qui réunit dix-huit pays participants. Cette victoire marque un tournant dans l’histoire du concours, « Poupée de cire, poupée de son » étant le premier morceau au style un peu « pop » à remporter l’Eurovision.

Claude François, qui est le compagnon de France Gall à l’époque, réagit très mal à sa victoire. Alors que la jeune chanteuse tente de l’appeler pour partager sa joie, il lui lance au téléphone une phrase cinglante : « Tu as gagné, mais tu m’as perdu ». Rongé par la jalousie de voir sa petite amie « lui voler la vedette », il rompt avec elle au moment même de son triomphe. Cette rupture soudaine est vécue comme « un drame absolu » par France Gall qui est « très amoureuse ». Par ailleurs, France Gall reçoit une gifle de la part de sa concurrente anglaise, furieuse de ne pas avoir gagné et persuadée que le concours était truqué. Juste avant de remonter sur scène pour interpréter à nouveau sa chanson victorieuse, France Gall pleure. Le public croit voir des larmes de joie, mais il s’agit en réalité de larmes de chagrin.

Après ce succès à l’Eurovision, les collaborations entre France Gall et Serge Gainsbourg se poursuivent. Entre 1964 et 1967, l’interprète de « Couleur café » écrit pour la jeune France Gall plusieurs chansons qui deviennent des tubes. Parmi celles-ci, on trouve « Attends ou va-t’en » (1965), une chanson d’amour mélancolique où s’entremêlent les thèmes de l’amour, de la passion et de l’abandon. « Baby Pop » (1966) est une chanson au ton enjoué mais aux paroles évoquant une dure réalité à laquelle les jeunes tentent d’échapper en dansant « comme si demain ne devait jamais revenir ». « Les Sucettes » (1966) devient un scandale quand France Gall découvre le double sens sexuel des paroles qu’elle chantait innocemment. Cette collaboration est pour lui, comme pour elle, un véritable tremplin. Après cette victoire dans le concours, le morceau « Poupée de cire, poupée de son » entre dans le top 10 des meilleures ventes dans 18 pays, avec 20.000 copies du disque vendues chaque jour.


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