CINECITTÀ, L’ARME CULTURELLE DU DUCE 📆 28 avril 1937-1945

Le 28 avril 1937, Benito Mussolini pose la premiĂšre pierre d’un rĂȘve impĂ©rial : CinecittĂ , « Hollywood sur Tibre », conçue comme l’arme culturelle du fascisme.

Quinze mois aprĂšs le dĂ©but des travaux, le complexe devient le plus grand studio europĂ©en, avec 16 plateaux de tournage, des rues reconstituĂ©es et des piscines pour des dĂ©cors maritimes. Son objectif est clair : rivaliser avec le cinĂ©ma amĂ©ricain et diffuser l’idĂ©ologie mussolinienne Ă  travers des films glorifiant la force, la discipline et le rĂ©gime. Scipione l’Africano (1937), Ă©popĂ©e coloniale exaltant la conquĂȘte de l’Éthiopie, en est le premier symbole.

Mais derriĂšre les paillettes, CinecittĂ  incarne aussi l’ambivalence d’un cinĂ©ma italien partagĂ© entre propagande et Ă©vasion. Si les films des « tĂ©lĂ©phones blancs » – comĂ©dies lĂ©gĂšres au dĂ©cor bourgeois – dominent les Ă©crans, le rĂ©gime contrĂŽle Ă©troitement les scĂ©narios, Ă©liminant toute critique. L’Institut Luce et le Centro Sperimentale di Cinematographie, intĂ©grĂ©s au complexe, façonnent une gĂ©nĂ©ration d’acteurs et de rĂ©alisateurs au service du Duce.

Le 28 avril 1945, huit ans jour pour jour aprĂšs l’inauguration triomphale, Mussolini est exĂ©cutĂ© sommairement par des partisans prĂšs du lac de CĂŽme. Son corps et celui de sa maĂźtresse Clara Petacci sont pendus par les pieds sur la Piazzale Loreto Ă  Milan, sous les huĂ©es d’une foule dĂ©chaĂźnĂ©e. Entre ces deux dates, le dictateur aura vu son rĂȘve cinĂ©matographique lui Ă©chapper : occupĂ©s par les nazis en 1943, puis transformĂ©s en camp de rĂ©fugiĂ©s par les AlliĂ©s, les studios survivent Ă  la chute du fascisme.

L’ironie de l’histoire veut que CinecittĂ , conçue pour cĂ©lĂ©brer la puissance mussolinienne, devienne aprĂšs-guerre le berceau du nĂ©orĂ©alisme, un cinĂ©ma social et critique. Rossellini, De Sica ou Fellini y filment la misĂšre et les espoirs d’une Italie en reconstruction. Dans les annĂ©es 1960, le complexe retrouve sa gloire grĂące aux superproductions hollywoodiennes comme Ben-Hur (1959), attirant Liz Taylor ou Audrey Hepburn.

Le 28 avril 1937 et le 28 avril 1945 marquent ainsi les deux visages de Mussolini : le bĂątisseur mĂ©galomane et le tyran lynchĂ© par son peuple. CinecittĂ , symbole de sa propagande, finit par incarner la rĂ©silience d’un art qui lui a survĂ©cu.


Pour continuer sur ce thĂšme


,

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *