Bachar Al-Assad

BACHAR : DE LA LÉGION D’HONNEUR À L’EXIL, LA QUEUE ENTRE LES JAMBES 📆 25 juin 2001

Le 25 juin 2001, Jacques Chirac accroche la grand-croix de la Légion d’honneur – la plus haute distinction de cet ordre – au costume de Bachar Al-Assad. Dans les salons feutrés de l’Élysée, le jeune président syrien incarne alors l’espoir d’une Syrie moderne. Chirac croit en ce médecin formé à Londres, promettant réformes et ouverture après des décennies de dictature sous son père.

Mais ce geste diplomatique, destiné à sceller une alliance stratégique au Proche-Orient, vieillira bien mal. Vingt-trois ans plus tard, le même Bachar fuit Damas en catimini, la queue honteusement entre les jambes, réfugié sous la protection russe – ultime déchéance pour ce prétendu réformateur.

L’illusion des débuts

À son arrivée en 2000, Bachar joue les modernisateurs. Il libère des prisonniers politiques, autorise des forums de discussion et promet la fin de l’état d’urgence instauré en 1963. Ce « Printemps de Damas » fait croire à un véritable dégel. Mais la mascarade ne dure que huit mois.

Dès février 2001, les services de renseignement referment la trappe : opposants jetés en prison, intellecteurs réduits au silence, toute velléité démocratique étouffée. Sur le plan économique, le régime libéralise à la marge – création de banques privées, ouverture aux investisseurs étrangers – mais ces réformes profitent surtout à la bourgeoisie sunnite proche du pouvoir.

Le boom immobilier de Damas masque mal la paupérisation galopante des campagnes, où la fin des subventions agricoles et une sécheresse historique précipitent 1,5 million de paysans dans la misère. Un simulacre de modernisation qui aggrave les inégalités sans toucher au cœur du système répressif.

La descente aux enfers

Quand le printemps arabe souffle sur la Syrie en mars 2011, Bachar révèle sa vraie nature. À Deraa, des adolescents taguent « À ton tour, docteur » sur les murs – allusion ironique à sa formation médicale. La réponse du « docteur » sera plutôt celle d’un boucher : balles réelles, tortures systématiques, bombardements de civils. Loin de l’image du réformateur, il déploie une terreur méthodique.

En juillet 2011, la révolte pacifique se mue en guerre civile quand des déserteurs forment l’Armée syrienne libre. Le régime répond par des massacres (Houla en 2012), des armes chimiques (Douma en 2018) et un siège implacable de villes insurgées. Treize ans de conflit génèrent 500 000 morts et 12 millions de déplacés – chef-d’œuvre de barbarie dont Bachar portera la responsabilité devant l’histoire.

Les interventions étrangères

Rapidement, la guerre syrienne devient un champ de bataille international. La Russie, dès 2015, vole au secours d’Assad, déployant avions, troupes et mercenaires pour bombarder les zones rebelles et redonner l’avantage au régime. Moscou justifie son intervention par la lutte contre Daech et les groupes djihadistes, mais son objectif réel est de « stabiliser l’autorité légitime » d’Assad et d’assurer ses propres intérêts stratégiques dans la région.

L’Iran, lui, envoie des milliers de combattants du Hezbollah et des milices chiites, transformant la Syrie en bastion de son influence régionale. Pendant ce temps, la Turquie soutient l’opposition armée, lance plusieurs offensives contre les Kurdes et Daech, et occupe des zones frontalières pour empêcher la création d’un territoire kurde autonome.

Les Occidentaux, France et États-Unis en tête, frappent Daech et réagissent ponctuellement à l’usage d’armes chimiques, mais laissent Assad s’accrocher au pouvoir grâce à l’appui de ses parrains russes et iraniens. Cette passivité culmine avec l’attitude de Barack Obama, qui s’illustre par une « lâcheté » devenue proverbiale sur la scène internationale.

En 2012, le président américain trace solennellement une « ligne rouge » : l’usage d’armes chimiques par le régime syrien déclencherait une riposte militaire américaine. Mais lorsque, en août 2013, Assad gaze la Ghouta et tue plus de 1 400 civils, Obama recule au dernier moment, préférant demander l’aval d’un Congrès hostile plutôt que d’assumer l’intervention promise.

Le monde entier assiste, médusé, à ce renoncement : la « ligne rouge » s’efface comme un trait de craie sous la pluie, et Assad comprend qu’il peut massacrer impunément, protégé par Moscou. Cette reculade, dénoncée jusque dans les rangs alliés, achève de discréditer la parole américaine et laisse la Syrie sombrer dans la barbarie, pendant que le « docteur » de Damas parade grâce à la couardise de ceux qui prétendaient défendre le droit international.

La Syrie devient ainsi le terrain de jeu sanglant des ambitions rivales, où le peuple syrien paie le prix fort de la géopolitique.

La lâche débandade

Fin 2024, le château de cartes s’écroule. Lâché par la Russie empêtrée en Ukraine et par un Iran distrait, Bachar voit son armée se déliter comme neige au soleil. Les soldats, non payés depuis des mois, désertent en masse. Quand les rebelles de Hayat Tahrir al-Cham lancent leur offensive fin novembre, les villes tombent comme des quilles : Alep, Hama, Homs. Le Hezbollah, dernier allié sérieux, plie bagage à Homs.

Le 8 décembre, Damas tombe sans combat sérieux. Dans la nuit, le « docteur » fuit comme un voleur, abandonnant son peuple à son sort. Direction Moscou, où Poutine lui accorde l’asile par charité – ultime humiliation pour celui qui se rêvait en nouvel Saladin. Sa fuite précipitée, les valises à moitié bouclées, scelle l’image d’un pantin déchu.

L’exil misérable

À Moscou, Bachar végète dans l’anonymat. Ses rares apparitions publiques le montrent hagard, répétant mécaniquement que les « terroristes » ont volé son pays. Plus de palais présidentiel, plus de gardes prétoriens – juste un appartement exigu – en comparaison de son palais d’antan – sous la surveillance bienveillante du FSB. Ses proches se dispersent comme des cafards : certains aux Émirats, d’autres en Égypte, tous nient connaître leur illustre cousin.

Pendant ce temps, la Syrie tente de renaître de ses cendres. Dans les rues de Damas, on déboulonne les statues des Assad, on rebaptise les avenues, on libère les prisons pleines à craquer. Le peuple danse autour des tanks abandonnés, arborant le drapeau de la révolte de 2011.

Bachar n’est plus qu’une mauvaise mémoire, un repoussoir historique dont la légion d’honneur – rendue en 2018 – symbolise désormais la duperie diplomatique. De l’Élysée aux bas-fonds de Moscou, le parcours d’un imposteur.


Illustrations:
– Remise de la grand-croix de la Légion d’honneur à Bachar Al-Assad par Jacques Chirac président de la république Française, 2001.
– Bachar et Vladimir, 2017. – Wikipédia
– Destructions à Aïn Tarma, 2017. – Wikipédia
– Bachar et Ali, 2017. – Wikipédia

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