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Alfred Dreyfus

CAPITAINE ALFRED DREYFUS : ARRESTATION D’UN INNOCENT 📆 15 octobre 1894

Le 15 octobre 1894, l’armĂ©e française arrĂȘte le capitaine Alfred Dreyfus au ministĂšre de la Guerre. L’ambiance est tendue, la surprise totale pour l’officier, qui n’imagine pas qu’on le soupçonne de trahison.

Dreyfus, polytechnicien et artilleur d’origine alsacienne et de confession juive, doit faire face Ă  la dictĂ©e d’un texte inspirĂ© du “bordereau”, lettre compromettante retrouvĂ©e dans les dĂ©tritus de l’ambassade d’Allemagne. On cherche Ă  lui arracher des aveux et, devant son refus et sa dignitĂ©, l’accusation, l’acharnement et le secret s’abattent sur lui et toute sa famille, qui dĂ©couvre l’arrestation dans la terreur et l’incomprĂ©hension.

Les prĂ©mices d’une injustice

La piĂšce principale de l’accusation, ce fameux bordereau, recense des secrets militaires relatifs notamment Ă  l’artillerie, au frein hydraulique du canon de 120, Ă  la mobilisation et Ă  l’organisation tactique. Le service de contre-espionnage français rĂ©cupĂšre ce document via une informatrice fouillant les poubelles de l’ambassade allemande.

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TrĂšs vite, la mĂ©canique accusatoire se met en place : la Section de statistiques cible Dreyfus pour sa prĂ©tendue ressemblance d’écriture, son origine alsacienne et sa judaĂŻtĂ©, qui font de lui le bouc Ă©missaire idĂ©al dans une France engluĂ©e dans l’antisĂ©mitisme et les prĂ©jugĂ©s militaires.

Un procĂšs factice

Lorsque le procĂšs militaire s’ouvre Ă  huis clos en dĂ©cembre 1894, Alfred Dreyfus fait face Ă  des juges dĂ©jĂ  convaincus de sa culpabilitĂ©. La seule « preuve » dĂ©cisive, l’analyse graphologique, demeure fortement critiquĂ©e et contestĂ©e.

Surtout, les juges reçoivent en cachette un dossier secret, constituĂ© illĂ©galement par les services militaires, qui ne contient aucune preuve directe contre le capitaine : lettres sans lien, documents manipulĂ©s, piĂšces parfois fausses et allusions confuses. Ce stratagĂšme judiciaire vise uniquement Ă  sceller la condamnation et Ă  protĂ©ger l’honneur de l’armĂ©e au dĂ©triment de toute justice.

La condamnation au bagne

Le verdict tombe le 22 dĂ©cembre 1894 : dĂ©portation perpĂ©tuelle en enceinte fortifiĂ©e pour intelligence avec l’ennemi, destitution et dĂ©gradation publique.

Le 5 janvier 1895, devant ses camarades, journaux et curieux, on arrache à Dreyfus ses insignes, on brise son sabre : il proteste de son innocence, clamant sa fidélité à la France.

Par la suite, il subit sur l’üle du Diable un isolement extrĂȘme, dans une case minuscule, surveillĂ© nuit et jour, privĂ© de toute humanitĂ©. Contrairement aux autres prisonniers politiques, l’administration pĂ©nitentiaire durcit son sort, multiplie les surveillances et l’empĂȘche mĂȘme de parler Ă  ses geĂŽliers ou de voir la mer.

Ce traitement d’une rare cruautĂ© dĂ©passe la norme dĂ©jĂ  impitoyable du bagne colonial : la France, pour Ă©touffer le scandale, pousse la logique punitive Ă  son comble.

Esterhazy : le vrai coupable

Au fil des annĂ©es, la recherche acharnĂ©e de la vĂ©ritĂ© s’incarne dans l’engagement de la famille Dreyfus et du colonel Picquart. L’enquĂȘte, les analyses graphologiques et les tĂ©moignages identifient enfin le vĂ©ritable auteur du bordereau : Ferdinand Walsin Esterhazy, officier français aux abois, qui avoue finalement son forfait dans la presse.

Pourtant, lorsqu’il passe en jugement devant le conseil de guerre en janvier 1898, Esterhazy est promptement acquittĂ© et ne sera jamais condamnĂ© pour intelligence avec l’ennemi, malgrĂ© ses aveux rĂ©pĂ©tĂ©s. La justice militaire se montre ainsi complice de l’innocent emprisonnement du capitaine Dreyfus, prĂ©fĂ©rant sauvegarder son honneur plutĂŽt que de reconnaĂźtre ses propres manquements.


Illustration: Alfred Dreyfus en 1894, photographie de Aron Gerschel. – WikipĂ©dia