LA DERNIÈRE REINE DE CHYPRE, PEUT-ÊTRE UN JOUR SUR NETFLIX 📆 14 mars 1489

Catherine Cornaro, dernière monarque du Royaume de Chypre, cède son trône et vend l’administration de son royaume à la République de Venise le 14 mars 1489, après avoir été forcée d’abdiquer le 26 février de la même année. Cette noble vénitienne, née en 1454, règne sur Chypre de 1474 à 1489, portant également les titres de Reine de Jérusalem et Reine d’Arménie.

La vie de Catherine Cornaro possède tous les ingrédients d’une série historique captivante. Son parcours extraordinaire combine intrigues politiques, trahisons familiales, amours tragiques et résilience face à l’adversité. De son mariage arrangé avec Jacques II de Chypre à son abdication forcée, en passant par son règne solitaire de seize ans, chaque épisode de sa vie est marqué par des rebondissements dramatiques qui tiendraient en haleine les spectateurs modernes. Accueillie chaleureusement par les Chypriotes, sa beauté est louée par tous les écrits de l’époque. Sa cour à Asolo, devenue célèbre pour accueillir artistes et littérateurs, ajoute une dimension culturelle fascinante à son histoire, immortalisée dans plusieurs opéras et œuvres d’art.

Les intrigues politiques jalonnent l’existence entière de Catherine. Dès l’âge de 14 ans, elle devient un pion dans un jeu d’échecs géopolitique lorsqu’elle est promise en mariage à Jacques II de Chypre. Déclarée « Fille de la République » par Venise, elle est utilisée comme instrument pour que la Sérénissime puisse revendiquer Chypre après la mort de son époux. Durant son règne, elle fait face à deux conspirations menées par des nobles catalans qui tentent de la renverser, toutes deux réprimées par Venise. Elle subit également des pressions constantes de Naples, de l’État papal et des menaces d’invasion de l’Empire ottoman, tout en résistant pendant des années aux manœuvres vénitiennes visant à prendre le contrôle direct de l’île.

La trahison familiale la plus douloureuse pour Catherine vient de son propre frère, Giorgio Cornaro. Après avoir résisté pendant des années aux pressions de Venise pour abdiquer, c’est finalement l’intervention de Giorgio qui la contraint à céder. Envoyé par la République, il utilise son influence fraternelle pour la convaincre de renoncer à son trône et de remettre Chypre aux mains de Venise. Cette trahison est d’autant plus amère que la famille Cornaro avait orchestré son mariage avec Jacques II pour servir leurs propres intérêts financiers et politiques, transformant Catherine en monnaie d’échange pour effacer les dettes que les Lusignan avaient contractées auprès d’eux.

L’amour et la tragédie marquent profondément la vie de Catherine. Son mariage avec Jacques II, d’abord célébré par procuration en 1468 quand elle n’a que 14 ans, ne se concrétise réellement qu’en 1472 lorsqu’elle rejoint enfin Chypre à l’âge de 18 ans. Mais ce bonheur est de courte durée : elle ne voit guère son époux, de 12 ans son aîné, qui se montre frivole. Jacques meurt subitement en 1473, après seulement quelques mois de vie commune, laissant Catherine enceinte et vulnérable. Elle donne naissance à leur fils, Jacques III, qui décède tragiquement avant son premier anniversaire, possiblement victime d’un assassinat orchestré par Venise ou par Charlotte, reine rivale de Chypre. Ces pertes successives plongent Catherine dans une profonde dépression, accentuant sa solitude sur une île étrangère.

La résilience de Catherine se manifeste tout au long de son règne de seize ans sur Chypre. Malgré son jeune âge, son veuvage précoce et la perte de son enfant, elle parvient à gouverner un royaume instable, faisant face à de multiples menaces internes et externes. Même après son abdication forcée, elle démontre une remarquable capacité d’adaptation. Son retour à Venise est paradoxalement triomphal : le 6 juin 1489, assise sur le Bucentaure aux côtés du doge Agostino Barbarigo, elle fait une entrée majestueuse dans la cité. Nommée « Dame d’Asolo », elle conserve son titre et son rang de reine, établissant une cour brillante qui devient un centre culturel renommé. Elle continue même à exercer une influence politique en défendant les intérêts des Chypriotes auprès de Venise, démontrant sa volonté de rester active et pertinente malgré sa destitution. Sa résilience ne faiblit qu’en 1509, lorsque la Ligue de Cambrai saccage Asolo, la forçant à se réfugier à Venise où elle s’éteint en 1510.


Illustration: Venise rend hommage à Caterina Cornaro, Hans Makart.

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