Le 18 septembre 2010, un homme bouleverse la notion même d’exploit : Philippe Croizon traverse la Manche à la nage alors qu’il est amputé des quatre membres. Ce défi d’une vie ressemble à une déclaration à la fois intime et universelle : rien n’est impossible pour celui qui croit en la force du collectif, de l’entraide et du courage. Sa traversée inspire, interroge et fait vibrer toute une société qui découvre, derrière la prouesse sportive, une profonde leçon d’humanité.
Sommaire
Une vie brisée… pour renaître
Philippe Croizon, ouvrier métallurgiste, voit sa vie basculer en 1994. Électrocuté accidentellement en démontant une antenne, il subit une quadruple amputation. Face au choc, il sombre dans la dépression et frôle le suicide, convaincu que tout s’arrête là , que la vie n’a plus de sens. Les batailles intimes sont violentes : il doit réapprendre à vivre, passer par toutes les phases du deuil. Dans le même temps, son épouse s’éloigne, leur relation s’écroule sous le poids du traumatisme et, après sept ans, le couple se sépare.
Dans cette nuit noire, Philippe touche le fond : la rage, la tristesse, la solitude. Mais il ne reste pas seul longtemps. Sa vie se métamorphose le jour où il s’inscrit sur un site de rencontres et fait la connaissance de Suzana, celle qui va lui tendre la main, l’entourer de bienveillance et l’aider à remonter. C’est à ses côtés qu’il retrouve l’envie de se battre, d’exister autrement, de prouver à lui-même et au monde que tout reste possible.
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S’entraîner envers et contre tout
Avant la traversée de la Manche, Philippe Croizon s’entraîne de façon quasi militaire : plus de 35 heures de natation hebdomadaire, 280 kilomètres chaque mois, des séances dans des lacs, des piscines et dans la mer. Il ajuste des prothèses spécialement conçues, apprend à dompter le froid, les courants et la fatigue, porté par une équipe soudée, des amis et surtout la présence indéfectible de sa compagne Suzana. Son mental d’acier s’affirme à chaque longueur, chaque découragement transformé en énergie positive.
Ce parcours lui permet de réaliser, le 18 septembre 2010, la traversée de la Manche entre Folkestone et le cap Gris-Nez en 13 heures et 26 minutes, devenant le premier quadri-amputé à accomplir cet exploit. Son cri de victoire, « J’ai réussi, c’est un truc de fou ! », résonne bien au-delà du monde sportif.
Des projets plein la tête
Depuis cette victoire, Croizon se consacre à un autre défi : transformer le regard sur le handicap. Il lance de grands projets pour prouver que rien n’est hors de portée, relie les cinq continents à la nage avec un autre nageur, s’attaque au rallye Dakar, bat des records de plongée… Tout devient possible sous le signe de l’inspiration et de l’inclusion. Il multiplie conférences, interventions, publications et accompagne de jeunes athlètes handicapés à l’Académie Philippe Croizon, fondée en 2018.
Son engagement se déploie dans les médias, les entreprises, les écoles pour défendre l’accessibilité, l’égalité des droits et l’inclusion des personnes handicapées. Il partage un message : « Le handicap ne doit pas être une fin, mais un départ vers de nouveaux possibles ».
L’exploit ultime : les étoiles
Aujourd’hui, Croizon nourrit un rêve ultime : voyager dans l’espace et devenir le premier quadri-amputé à rejoindre l’aventure spatiale avec SpaceX et Elon Musk. Il transforme le handicap en vecteur d’exploration, de conquête et de transmission, affirmant que chaque individu peut transcender ses limites et ouvrir de nouveaux horizons.
Illustration: Philippe Croizon a termin̩ le grand raid en 65 heures. РCr̩dit : AFP / Philippe Huguen РRTL
