Oh, alors lĂ , Ă©coute bien, parce que ce soir-lĂ , le 26 mai 1993, jamais jâoublierai cette date, on Ă©tait trois, serrĂ©s comme des sardines devant la tĂ©lĂ©, et je te jure, ça a chantĂ© plus fort quâau Virage Sud !
Oh les gars, tu te rappelles quand ça a commencĂ© ? Jâavais le palpitant Ă mille, jâaurais pu alimenter tout le stade VĂ©lodrome avec mon cĆur, tellement il battait fort ! Les Milanais ils faisaient les beaux, ils avaient des tĂȘtes Ă jouer dans les pubs de parfum, mais nous, on sentait que ça pouvait le faire ! Je te dis, mĂȘme la vieille du troisiĂšme, elle a sorti son drapeau bleu et blanc sur le balcon, elle criait « Allez lâOM » avec sa voix de crĂ©celle, câĂ©tait un signe, frĂšre !
Eh, tu mens pas ! DĂšs le dĂ©but, jâai vu Barthez, le minot, il Ă©tait chaud bouillant, il arrĂȘtait tout, mĂȘme les moustiques ils passaient pas ! Ă un moment, jâai cru quâil allait arrĂȘter le temps, tellement il volait dans les cages ! Les Milanais, ils tiraient, ils tiraient, mais Barthez il avait des mains comme des raquettes de tennis, rien ne passait ! MĂȘme la tĂ©lĂ© elle a failli buguer tellement il allait vite Ă lâĂ©cran, jâai cru quâon avait mis la cassette en avance rapide !
Et Desailly, oh, il mettait des tacles de camionneur, les Milanais ils savaient plus oĂč ils habitaient ! Je te jure, Ă chaque fois quâil touchait le ballon, on aurait dit quâil dĂ©clenchait un tremblement de terre, la table elle a tremblĂ© ! On Ă©tait lĂ , Ă gueuler comme des fadas, la voisine elle a cru quâon allait tout casser, elle est venue taper Ă la porte pour demander si on Ă©gorgeait un cochon ou si câĂ©tait juste le match !
Et lĂ , juste avant la mi-temps, corner pour nous, je me lĂšve, je sens le truc arriver, je crie « Vas-y Abedi ! » tellement fort que mĂȘme PelĂ© il a dĂ» mâentendre depuis Munich !
Oh, PelĂ© il la met pile poil, câest pas un corner, câest une offrande, une bĂ©nĂ©diction ! Et Boli⊠Boli, il sâarrache, il saute, il met la tĂȘte de sa vie, frĂšre ! Il a dĂ©collĂ© comme un hĂ©licoptĂšre de la Marine, il a survolĂ© tout le monde, mĂȘme les pigeons ils Ă©taient jaloux !
Je tâai vu, tâas renversĂ© la table, tâas fait tomber les olives, le pastis, et mĂȘme la nappe de mamie ! Je te jure, on aurait dit un tsunami dans le salon !
Oh, jâai mĂȘme embrassĂ© le chien, je savais plus oĂč jâĂ©tais, frĂšre ! Jâai criĂ© si fort que le poisson rouge il a sautĂ© hors du bocal, il voulait fĂȘter le but lui aussi !
Toute la rue elle a entendu, on a hurlĂ© « GOOOOAAAL » comme des brĂ©siliens, mĂȘme les mouettes elles se sont mises Ă danser sur les toits, je te jure câĂ©tait la fĂȘte nationale !
AprĂšs, la deuxiĂšme mi-temps, oh la la, jâai cru que jâallais faire une syncope. Les Milanais ils poussent, ils poussent, mais nos minots ils lĂąchent rien, ils dĂ©fendent comme des sangliers ! Je te dis, ils Ă©taient partout, mĂȘme dans la tĂ©lĂ© on les voyait plus, ils Ă©taient devenus invisibles, câĂ©tait la magie marseillaise !
Barthez, il vole, il plonge, il fait des arrĂȘts de fou ! MĂȘme ma mĂšre elle a criĂ© « Bravo le petit ! » alors quâelle regarde jamais le foot, elle croyait que câĂ©tait son fils tellement elle Ă©tait fiĂšre ! Ă un moment, jâai cru que Barthez allait sortir du terrain pour aller acheter le pain et revenir sans prendre de but !
Et quand lâarbitre il siffle la fin, oh, on sâest tous pris dans les bras, on a pleurĂ©, on a chantĂ©, on a mĂȘme appelĂ© le cousin Ă la Belle-de-Mai, il entendait rien, yâavait des klaxons partout, mĂȘme le tramway il sâest arrĂȘtĂ© pour fĂȘter ça ! Les gens ils dansaient sur les balcons, les casseroles elles volaient, câĂ©tait la folie, la vraie !
Ce soir-lĂ , Marseille elle a brillĂ© plus fort que la Bonne MĂšre, je te le dis ! On aurait dit que le soleil sâĂ©tait couchĂ© rien que pour laisser la place Ă la lumiĂšre de lâOM !
On a fĂȘtĂ© ça jusquâau matin, mĂȘme les mouettes elles chantaient « Allez lâOM ! » et le boulanger il a offert les croissants Ă tout le quartier, parole !
Et ça, frĂšre, câest gravĂ© dans nos cĆurs pour la vie ! Allez lâOM, champions dâEurope, personne pourra jamais nous lâenlever, mĂȘme si les Parisiens ils veulent nous charrier, on leur rĂ©pondra toujours avec la coupe et le sourire, oh !
Et surtout, merci Bernard Tapie pour cette Ă©quipe de dingues ! Sans toi, jamais on aurait vĂ©cu ce rĂȘve Ă©veillĂ©. Merci Boss, Ă jamais dans nos cĆurs !
Illustration: Image générée par IA (Sora)