Snecma C-450 Coléoptère mis en position pour le décollage

LE COLÉOPTÈRE, L’OVNI À LA FRANÇAISE 📆 6 mai 1959

Le 6 mai 1959, le Snecma C-450 Coléoptère s’arrache du sol pour la première fois en vol libre. Un engin futuriste, une prouesse technique, un pari fou sur l’avenir de l’aviation. Plongée dans l’histoire d’un prototype qui ose tout.

Contexte de rupture et objectif ambitieux

En pleine guerre froide, la crainte de voir les pistes d’aviation détruites par un bombardement ennemi pousse les ingénieurs à repenser l’aviation militaire. Les états-majors veulent des avions capables de décoller et d’atterrir sans dépendre de longues pistes vulnérables. Le décollage et l’atterrissage à la verticale deviennent une obsession dans les bureaux d’études du monde entier : il s’agit de garantir l’opérabilité des chasseurs même en cas de conflit majeur, depuis n’importe quelle clairière ou terrain improvisé. La Snecma, fleuron de l’industrie aéronautique française, s’engage alors dans une course à l’innovation, rêvant d’un appareil révolutionnaire qui s’affranchit totalement des infrastructures traditionnelles.

Des choix techniques radicaux

C’est dans ce contexte que naît le Snecma C-450 Coléoptère, un prototype d’avion à décollage et atterrissage vertical (ADAV) qui ne ressemble à rien de connu. Sa structure intègre une aile en anneau de 3,20 mètres de diamètre, quatre petits empennages et un cockpit monté sur un siège mobile, offrant au pilote une visibilité optimale en toutes phases de vol. Le moteur Snecma Atar 101-EV de 3 700 kgp de poussée est placé au centre, accroché par quatre mats symétriques. Ce choix audacieux de l’aile annulaire permet d’obtenir une portance multidirectionnelle, de réduire les turbulences et de concentrer la puissance autour du moteur, tout en facilitant la transition entre vol vertical et horizontal. Les commandes de vol sont innovantes : déviateurs de jet, injecteurs d’air comprimé, gouvernes aérodynamiques et empennages canards escamotables. Le Coléoptère incarne ainsi une vision radicale de l’aviation du futur, où la technologie se met au service de la liberté d’action et de la résilience stratégique.

6 mai 1959 : le premier vol libre

Ce jour-là, Auguste Morel, pilote d’essai chevronné, prend place dans le cockpit. Les moteurs rugissent. Le Coléoptère s’arrache du sol, grimpe droit vers le ciel. Pendant plus de trois minutes, il vole de ses propres ailes, sans assistance. Le pari est tenu : l’appareil décolle verticalement, se stabilise, prouve que le rêve est possible.

C’est un exploit. Le Coléoptère entre dans la légende, ouvrant la voie à de nouvelles recherches sur la propulsion, la stabilité, le contrôle des avions à décollage vertical.

Le défi du décollage vertical

Le Coléoptère n’est pas seul dans la course à la verticalité. Partout dans le monde, des ingénieurs planchent sur des ADAV – avions à décollage et atterrissage vertical. Mais rares sont ceux qui osent l’aile en anneau. Ce pari technique s’accompagne d’innovations : déviateurs de jet, injecteurs d’air comprimé pour le contrôle en vol stationnaire, siège éjectable pivotant pour la sécurité du pilote.

L’appareil s’élève, pivote, tente de passer du vol vertical au vol horizontal. La transition est délicate, la stabilité précaire. Les essais se succèdent, les difficultés s’accumulent. Mais chaque vol apporte son lot de découvertes, d’enseignements, d’avancées pour l’aéronautique.

Le crash qui brise le rêve

Mais l’histoire du Coléoptère ne s’écrit pas sans drame. Le 25 juillet 1959, lors du neuvième vol d’essai, le prototype doit effectuer une nouvelle transition entre vol horizontal et vertical. Soudain, tout bascule : l’appareil s’incline violemment, perd sa stabilité, et devient incontrôlable. À quelques dizaines de mètres du sol, Auguste Morel n’a d’autre choix que de s’éjecter. Il s’en sort grièvement blessé, tandis que le Coléoptère s’écrase et se disloque sur la piste. Ce crash met un terme définitif au programme. Les difficultés de pilotage et de stabilisation en vol vertical, encore mal comprises à l’époque, auront eu raison de ce pionnier.

Héritage d’un pionnier

Si le Coléoptère finit par s’écraser lors d’un vol d’essai, il laisse derrière lui un héritage précieux. Les innovations développées – aile annulaire, commandes de vol spécifiques, intégration moteur-cellule – inspirent d’autres projets et enrichissent la connaissance aéronautique. Divers prototypes tentent l’aventure, mais la plupart s’arrêtent avant la production.


Photo: Placement en position de décollage du Coléoptère. – Wikipédia

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